EMELINE Michel, DEESSE DE LA CHANSON CREOLE.

EMELINE Michel, DEESSE DE LA CHANSON CREOLE.

1987-2009, déjà vingt deux ans sur les plateaux à titre de chanteuse professionnelle pour Emeline Michel, qui fut la cible de toutes les caméras de Montréal au cours du Festival Compas de Montréal qui s’est tenu du 9 au 12 juillet 2009. Emeline y a été retenue comme invitée d’honneur cette année pour avoir traversé les océans avec la culture haïtienne et fait honneur à sa patrie. Malgré sa longue carrière, ses talents ineffables, son succès incommensurable, ses chansons les unes plus populaires que les autres, elle demeure inconnue pour nombreux, particulièrement pour ceux de la nouvelle génération. Pour ces derniers et pour ses nombreux fans, nous jetons un regard rétrospectif sur la vie, la carrière de cette chanteuse, qui s’est déjà octroyée une place de choix dans le panthéon culturel national.

Née aux Gonaïves en 1967, Emeline Michel a grandi à l’ombre de parents, qui l’ont élevée avec grâce et amour. De foi chrétienne, ces derniers se sont donnés pour devoir de lui inculquer le respect de la divinité, l’amour du prochain, l’estime de soi. L’église baptiste, bastion, ruche intarissable de talents va conduire dans les tympans la voix de cette jeune étoile, qui saura conquérir bien des cœurs dès l’âge de douze ans.

Quelques années plus tard, le public de l’auditorium du Collège Saint-Pierre, où elle a fait ses études secondaires, craque sous le charme de sa voix, qui exprime simultanément amour et sensibilité, douceur et douleur. En effet, si le timbre vocal d’Emeline est mielleux, invite Amandine à la sensualité, il est aussi mélancolique et transporte la misère de ‘’Ti Magali’’, le désespoir de nos compatriotes dans les ‘’bateys’’ dominicains….

Au terme de ses études, elle bénéficie d’une bourse d’études au Detroit Jazz Center, où elle côtoiera de grands noms de la musique internationale comme : Aretha Franklin, Anita Baker… A ses talents d’interprète, de danseuse, elle greffe les abc du chant, la présence scénique et se prépare à dévoiler au monde à travers elle, la face cachée d’Haïti.

Après un brillant passage au Detroit Jazz Center, elle revint au bercail à une époque où la télévision se libère de certaines chaînes, où de nouvelles tendances musicales déferlent sur la vague de la nouvelle génération, issue de l’école des frères Widmaïer, Joe Doré, Gilbert Bailly, John Doane, Patrick Brun et Patrick Handal, magistralement propagée par Jean Pierre Brax…

Le concours de chant ‘’Mwen renmen Ayiti’’ de American Airlines, réalisé en 1987, a servi de tremplin pour Emeline qui s’est présentée au public haïtien, qu’elle a laissé sans voix, dans une interprétation en duo avec Loulou Daday de ‘’Ayiti, peyi solèy’’. Quelques mois plus tard, elle livre à l’appréciation du public son premier album titré ‘’Douvanjou ka leve’’. Un an n’a pas suffit pour savourer ce premier pas, un pas de géant, mais elle récidive en 1988 avec ‘’Flanm’’, un album référence, qui a su conduire la cantatrice dans les cœurs de toutes les générations. En 1990, elle se permet de sortir deux albums ‘’ Pa gen manti nan sa’’ et ‘’Tout mon temps’’. La qualité des produits, la providence aidant, les deux furent très appréciés.

Si la chanteuse émérite, danseuse chaleureuse fait couler encre et salive sur la terre de Dessalines, elle n’a pas encore conquis les cœurs du monde, malgré qu’elle fût entourée de plusieurs des meilleurs paroliers de sa génération, tels : Beethova Obas, Ralph Boncy, Papa Jube… En 1991, la situation politique d’Haïti la contraint à laisser le pays pour Montréal, elle en profite pour se produire au Zénith, en France aux côtés de Mory Kante. De là, débute son idylle avec le public étranger qui l’accueille à bras ouverts. D’un concert à un autre, l’artiste grandit et imposa sa voix dans les cœurs et les tympans. En 1993 elle concocte ‘’Rhum et Flamme’’, en 1996 ‘’ Banm Pase’’, ‘’Cordes et âmes’’ en 2000, ‘’Rasin Kreyol’’ en 2005 et Reine de cœur en 2007. Les chansons ‘’Tankou yon melodi’’, ‘’Flanm’’ et ‘’A.K.I.K.O’’ l’ont hissée au sommet de la gloire.

A l’instar d’Haïti, le Japon, l’Afrique, Le Canada, les Etats-Unis d’Amérique, l’Amérique du sud, la France… tous ont succombé sous le charme de la voix, de la beauté d’Emeline Michel, la gonaïvienne, mais, malgré ce palmarès épatant, elle demeure simple, gentille, ne se repose pas sur ses lauriers, mais continue à travailler pour améliorer son style, présenter des nouveautés afin de demeurer la même idole des cœurs des années 90.

Mère d’un garçon, l’artiste s’est installée au cœur de New York, où elle dirige sa maison de production ‘’Cheval de feu’’. Emeline, c’est plus qu’une chanteuse, c’est la déesse de la chanson créole.

Richarson Dorvil