Quand les corps en mouvement se dessinent

Ce mardi, a lieu le vernissage de l’exposition des peintures, dessins et collages des jeunes comédiens haïtiens et des membres du Centre culturel André Malraux à Rouen.

Elle a été précédée de la performance artistique avec la danseuse Linda Isabelle François, des comédiens de Pyepoudre et des Français ayant pris part la veille à l’atelier d’arts plastiques animés par le plasticien bissau-guinéen Braïma Injaï.

Après leur représentation vendredi de la création de Paula Clermont Péan et leur participation à côté de leurs pairs français au spectacle de Gilbert Rault à la Maison Jacques Prévert de Dieppe, les jeunes comédiens haïtiens poursuivent l’aventure de l’échange artistique dans le cadre du projet « Croisons les arts entre Haïti et la France » qui se poursuit jusqu’au 3 novembre dans la Haute-Normandie.

Ces jeunes comédiens se sont laissés allés, comme dans des jeux de hasard, pour mettre en valeur leurs talents de plasticien. Ils ont déjà auparavant réalisé des dessins, sur une proposition de Joëlle Legland – l’un des partenaires du projet – à partir des thèmes du spectacle de Paula Clermont Péan, « A la croisée des îles », qui traite de l’enfance maltraitée, abandonnée dans les rues et surtout d’îles, de mer, de vagues, de tempêtes, de bateaux…

A travers leur dessins où domine le bleu, ils ont exprimé toutes les composantes naturelles, tout ce qui se rapporte à l’île, voire à la réalité sociale de leur pays.

Parmi les participants à l’atelier d’arts plastiques, certains se sont plus distingués que d’autres, montrant leur véritable talent de plasticien. Staloff Tropfort en est l’exemple. Son dessin – qui traduit la tempête – a fait l’objet de dessin de l’affiche du spectacle joué à la salle Jacques Prévert de Dieppe en présence du maire Sébastien Jumel.

Le clou de cet atelier a été une performance où, inspirés des mouvements de la danseuse Linda Isabelle François et les rôles de Saint-Phar Pyram et Wedly Mozeau, les participants ont dessiné la scène artistique.

La danseuse inscrit sa performance à la fois dans le traditionnel et la danse contemporaine. Cette performance a été théâtralisée, car les deux acteurs jouent des affamés, des laissés-pour-compte et des désespérés.

L’ancien directeur du centre Malraux, Patrice Daniel, qui a pris part avec d’autres Français à cette performance, est celui qui a le mieux réussi le pari de mieux traduire, d’évoquer, dans un style impressionniste, les émotions qui se sont dégagées à travers le corps de la danseuse Linda Isabelle François.

Patrice Daniel recrée la scène de performance, à travers des silhouettes (en noir) qui dansent. On sent tous les mouvements du corps (le bras de la danseuse qui se lève vers le haut, en signe de détresse, de plainte et d’imploration). Lazard Joël a quant lui créé une atmosphère de mouvements dans ses dessins abstraits où le corps de la danseuse semble tanguer comme un bateau secoué par la marée.

La comédienne et chanteuse Jéhyna Sahyeir Célestin a magnifiquement bien interprété « Wangòl » (chanson traditionnelle exprimant le départ) et un chant-prière du vaudou qui exprime la compassion, la délivrance d’Haïti. Le frisson, la tendresse qui se sentent dans la voix de cette jeune chanteuse contribuent à faire de cette performance une œuvre qui produit du sens, du réel, qui s’inscrit dans une histoire, un imaginaire et un vécu collectifs.

Linda Isabelle François continue d’échanger avec les Français en animant ce lundi soir à la Maison des jeunes de Dieppe un atelier de danse, où se croisent dans ses mouvements corporels le traditionnel, le moderne, le contemporain, le hip-hop.

L’atelier d’arts plastiques s’est poursuivi jusque dans la matinée du mardi 29 octobre au centre Malraux où dans la soirée, les Haïtiens et les Français s’apprêteront à présenter tour à tour leurs spectacles autour de l’enfance et de l’île : « A la croisée des îles de Paula Clermont Péan » et « D’une île à l’autre » de Gilbert Rault.

Ces deux créations théâtrales, inspirées du roman « Sa majesté des mouches » du Britannique William Golding, sont en tournée depuis le 25 octobre dans les salles de théâtre de Dieppe, Rouen et Neufchâtel-en-Bray, dans la Haute-Normandie.

Chenald Augustin

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